Ziglôbitha, HORS-SERIE n°01, Octobre 2023 [MONOGRAPHIE]
Ziglôbitha, HORS-SERIE n°01, Octobre 2023 [Sommaire]
CONTENU
Mathilde BERG
Résumé : Dans les romans traitant des mémoires de l’esclavage et de la colonisation, les trois pointes du triangle utilisé métaphoriquement pour parler du commerce des esclaves – l’Europe, l’Afrique et les Amériques – sont souvent représentés. C’est le cas dans Tels des astres éteints, roman de Léonora Miano publié en 2008, qui raconte les vies croisées de trois jeunes Noir•es, dont deux viennent d’Afrique et une de l’outremer, vivant dans un pays européen, l’Hexagone. Tous trois ont, à des degrés différents, conscience de l’histoire de leurs communautés et de celle des diasporas afrodescendantes, et tentent de se construire malgré un passé alourdi par le souvenir de l’esclavage et de la colonisation. Dans Tels des astres éteints, la question des lieux est directement liée à celle de la mémoire : toutes deux structurent autant la vie des personnages principaux que le roman lui-même. Cet article a pour but d’étudier les différents lieux présents dans le texte afin de démontrer que ces lieux romanesques permettent de produire des récits sur l’esclavage et la colonisation.
Mots-clés : Colonisation, esclavage, immigration, lieux, mémoire, postmémoire, traumatisme
Abstract : In novels about remembrance of slavery and colonization, the three points of the triangle that is used to metaphorically talk about slave trade – Europe, Africa and Americas – are often represented. It is visible in Tels des astres éteints (Like extinguished stars), a Léonora Miano’s novel published in 2008. It tells the story of Black people, two coming from Africa and one from ultramarine, who live in a European country called “l’Hexagone” (the Hexagon). They all acknowledge to different levels the history of their community and of Afrodescendant diasporas, and try to build their life in spite of their heavy slaved and colonized past. In the novel, questions around locations are directly linked to those around memory: they both structure the life of the characters and the novel itself. This article aims to study different locations in the text to demonstrate that novelistic locations enable to produce tales about slavery and colonization.
Keywords : Colonization, immigration, locations, memory, postmemory, slavery, trauma
Mohammed ALILOUCH
Résumé : Le romancier anglais George Orwell façonne son cadre spatial dystopique – baptisé « l’Océania » – de sorte à ce qu’il soit capable d’accueillir une des dystopies politiques les plus cauchemardesques. À cet égard, nous allons nous appesantir dans le présent travail sur l’analyse de l’espace dystopique orwellien tout en faisant ressortir son intérêt dans la configuration romanesque du texte objet d’étude. Il sera question dans ce propos de tirer au clair la signification onomastique inhérente aux lieux évoqués dans le récit (noms de bâtiments et institutions étatiques), tout en mettant en exergue l’apport derrière la dominance d’un espace méticuleusement hiérarchisé. Sans perdre de vue également l’idée selon laquelle l’auteur s’évertue d’abolir et d’omettre toute référence à l’espace intime, étant donné que les individus au sein de cette société imaginaire sont systématiquement soumis à un processus de surveillance extrême même au sein des demeures, lesquelles sont censées être un lieu de sécuritéii et de sérénité. Du reste, il faut mentionner à titre de rappel que l’aspect prophétique et anticipatif de l’œuvre se miroite, à grande échelle, sur la dimension spatiale où la vision futuriste de G. Orwell était d’une pertinence indéniable vu le mode de vie de notre époque qui mime certaines spécificités de l’espace dystopique orwellien (caméras de surveillance omniprésentes, espaces exigus etc.).
Mots-clés : espace dystopique – totalitarisme – Océania
Abstract : The English novelist George Orwell is shaping his dystopian space setting – called “Oceania” – so that it can accommodate one of the most nightmarish political dystopias. In this regard, we will focus on this work on analysis of dystopian space. Il be discussed in this connection to clarify the onomastic meaning inherent in the places mentioned in the story (names of buildings and state institutions), while highlighting the interest behind the dominance of a meticulously hierarchical space.Without losing sight of the idea that the author strives to abolish and omit any reference to intimate space, Given that individuals in this imaginary society are systematically subjected to a process of extreme surveillance even within homes,which are supposed to be a place of security and serenity. Moreover, it should be mentioned as a reminder that the prophetic and anticipative aspect of the work is mirrored, on a large scale, on the spatial dimension where the futuristic vision of G. Orwell was of undeniable relevance given the lifestyle of our time that mimics certain specificities of the Orwellian dystopian space (ubiquitous surveillance cameras, cramped spaces etc.).
Keywords : Dystopian space – totalitarianism – Océania
Sihem MISSAOUI
Recréer la mémoire collective : Les lieux fondateurs de l’origine dans l’œuvre de Patrick Chamoiseau
Résumé : Le propre de l’écriture de Patrick Chamoiseau est qu’elle s’inscrit dans une perspective identitaire. L’écrivain revisite l’époque précoloniale pour trouver les traces lui permettant de réinventer la mémoire collective car le défaut de continuité avec le passé instaure une crise d’identité. Par la recréation des lieux d’appartenance identitaire, l’écrivain veut fonder une origine. À ce titre, la cale du bateau négrier acquiert une valeur cosmogonique, elle est représentée comme un ventre maternel dans lequel a eu lieu une gestation infâme, une malédiction. En effet, la descente dans la cale du bateau va entamer une nouvelle vie pour l’esclave déporté. Ce dernier est mort symboliquement pour renaître sous une autre forme. Contrairement à la cale qui est représentée comme un lieu infernal, la forêt est représentée comme un lieu salvateur. Située aux antipodes de la plantation esclavagiste, elle permet à l’esclave d’accéder à sa personne avant de mourir. Ce dernier y sort de son inertie et répond à l’appel de vie, il redevient l’Homme qu’il était avant la malédiction. Le recours au merveilleux confère à ce lieu une dimension mythique, en insistant sur l’aspect sauvage de cette forêt mirifique, l’écrivain donne à la fuite de l’esclave un aspect grandiose, en affrontant plusieurs obstacles, ce dernier fait preuve de courage et de bravoure, il meurt comme un héros légendaire, ce qui est une façon de remédier à l’absence d’un héros populaire.
Mots clés : Quête identitaire- mémoire collective- lieux mythiques- origine – cosmogonie-esclavage- malédiction – renaissance- réinvention mémorielle et identitaire
Abstract : Patrick Chamoiseau’s writing is rooted in a sense of identity. The writer revisits the pre-colonial era to find traces that will enable him to reinvent the collective memory, because the lack of continuity with the past creates an identity crisis. By recreating places of identity, the writer seeks to establish an origin. In this respect, the hold of the slave ship acquires a cosmogonic value; it is represented as a maternal womb in which an infamous gestation has taken place, a curse. The descent into the hold of the ship will begin a new life for the deported slave. He has symbolically died, only to be reborn in another form. Unlike the hold, which is depicted as a hellish place, the forest is depicted as a place of salvation. Situated at the opposite end of the spectrum from the slave plantation, it allows the slave to access himself before dying. The slave emerges from his inertia and responds to the call of life, becoming the man he was before the curse. The use of marvellous imagery gives this place a mythical dimension. By insisting on the wild aspect of this miraculous forest, the writer gives the slave’s escape a grandiose aspect.
Keywords : Quest for identity – collective memory – mythical places – origin – cosmogony – slavery – curse – rebirth – reinvention of memory and identity
Bla Mireille N’GUESSAN
Résumé : Le jeu théâtral prend véritablement forme lors de sa projection dans un espace construit pour la représentation. Ainsi, le cadre spatial mentionné dans le texte puis matérialisé sur la scène permet de comprendre les situations qui prévalent dans la trame. Cet article entend mettre en évidence la réalité métaphysique qui sous-tend les différents aspects de la scène ionescienne. Le goût du paroxysme cher à Eugène Ionesco se manifeste de plus belle dans Jeux de massacre où la scène est utilisée d’une manière spectaculaire. Elle subit une explosion, un morcellement et une juxtaposition. Au vu de ses caractéristiques, la scène ionescienne prend activement part à l’action en privant les personnages de liberté. Elle les confine et les torture jusqu’à ce que mort s’ensuive. Ce modèle scénique révèle la tragique réalité existentielle qui échoue inéluctablement sur la mort et s’inscrit au compte des innovations entreprises par Eugène Ionesco dont celle de faire passer la scène du stade de simple support de représentation à celui d’acteur.
Mots-clés : jeu théâtral, scène, explosion, tragique, innovations
Abstract : The theatrical play really takes shape when it is projected into a space built for the performance. Thus, the spatial framework mentioned in the text then materialized on the scene makes it possible to understand the situations which prevail in the weft. This article intends to highlight the metaphysical reality that underlies the different aspects of the ionescian scene. The taste for paroxysm dear to Eugène Ionesco manifests itself even more in Jeux de massacre where the scene is used in a spectacular way. It undergoes an explosion, a fragmentation, a juxtaposition. In view of its characteristics, the ionescian scene takes an active part in the action by depriving the characters of freedom. She confines them and tortures them to death. The scenic model reveals the tragic existential reality that inevitably fails on death and is part of innovations undertaken by Eugène Ionesco, including that of moving the scene from the stage of a simple support for representation to that of an actor.
Keywords : Theatrical play, scene, explosion, tragic, innovations.
Mouhamed Abdou Latif MBENGUE
RESUME : Cet article traite du genre utopique et de son expression chez John Steinbeck et Willa Cather notamment dans la représentation que ces deux auteurs font de l’Ouest Californien. Ce vaste territoire se présente ainsi comme une sorte de terre promise, un lieu mythique où se mêlent aventures et imaginaire. L’utopie en tant que genre hérité de Plato et de Thomas More semble s’exprime chez ces deux auteurs sous la forme d’une quête de cet ailleurs qu’est l’Ouest et dont le symbole est le pionnier et le migrant qui voient en ces terres de l’Ouest le topos où doit s’accomplir leurs rêves les plus démesurés. S’appuyant sur une approche historique et sociologique l’étude cherche à rendre compte des origines du genre utopique et de son évolution dans le temps et de son expression chez Platon, Thomas More, John Steinbeck et Willa Cather.
Mots-clés : Aventure, Mythe Rêve, Terre promise, Utopie.
ABSTRACT : This article discusses the utopian genre and its expression in the works of John Steinbeck and Willa Cather, particularly in the representation that the two authors make of the Califinian West. This vast territory thus presents itself as a sort of promised land, a mythical place where adventure and imagination meet. Utopia as a genre inherited from Plato and Thomas More seems to express itself in the works of Steinbeck and Cather in the form of a quest for an elsewhere symbolized by the West and the figure of both the pioneer and the migrant, who see in the wast lands of the West the topos where their wildest dreams will come true. Based on a historical and sociological approach, the study looks into the origins of the utopian genre, its evolution over time and its expression in the works of Plato, Thomas More, John Steinbeck and Willa Cather.
Keywords: Adventure, Dream Myth, Promised Land, Utopia
Simplice Noguès GODO
Résumé : le théâtre de Brecht s’est révélé être, plus de soixante ans après sa mort, une rupture esthétique et idéologique dans la pratique de l’art dramatique. Marquée par les troubles socio-politiques du XXe siècle, son écriture se veut la traduction de ses convictions esthétiques notamment avec le principe de la disjonction. La présente réflexion montre que par une déstructuration à la fois actantielle et spatio-temporelle du texte théâtral, la logique disjonctive apparait comme l’assise textuelle de la distanciation.
Mots-clés : Disjonction – Antigone – Théâtre épique – Distanciation.
Abstract : Brecht theater has shown to be, more than sixty years after his death, an esthetic and ideologic breaking in the practice of dramatic art. inspired by socio-political uprisies of XXth century, his writing expressses his esthetic ideas, especially the use of separation. The present study shows that the drama special organisation is responsible of distanciation.
Key words : Separation – Antigone – epic drama – distanciation
Piyabalo NABEDE
Résumé : L’objectif de la présente étude est de faire une analyse comparative entre l’œuvre, Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline, et Gens de Brume de Bena Djangrang Nimrod. En effet, l’analyse des paysages chez ces deux auteurs est incommensurable de par leurs voyages tous azimuts en Afrique et partout ailleurs. Voyage au bout de la nuit révèle l’aspect exotique, une promenade qui a permis à Céline de s’en attribuer les espaces. Qui plus est, Cette excursion littéraire porte une particularité passionnante, car l’écriture de Louis-Ferdinand Céline s’élabore à partir de la traversée authentique et physique de l’espace. Les descriptions littéraires reposent sur des actes de paysages et des saveurs palpables. L’observation des phénomènes sensibles est l’apanage de Nimrod dans son ouvrage Gens de Brume. Cette observation de la nature lui permet de décrire non seulement son émoi, mais aussi son enfance du terroir et ses voyages.
Mots-clés : Afrique, empirisme, exotisme, écriture, saveur.
Abstract: The objective of this study is to make a comparative analysis between Voyage au bout de la nuit by Louis-Ferdinand Céline, and Bena Djangrang Nimrod’s Gens de Brume. Indeed, the landscape analysis of these two authors is immeasurable by their all-out travels in Africa and everywhere else. Voyage au bout de la nuit reveals the exotic aspect, a ramble which allowed Céline to possess spaces, In addition, this literary excursion has a fascinating peculiarity because Louis Ferdinand Céline’s writing is developed from the authentic and physical crossing of space. The literary descriptions are based on acts of landscapes and palpable flavors. The observation of sensitive phenomena is the prerogative of Nimrod in his work Gens de Brume. This observation of nature allows him to describe not only his emotion, but also his childhood and travels.
Keywords: Africa, empiricism, exoticism, writing, flavor.
Escoffier-Ulrich KOUASSI
Résumé : Exaltant pour l’imagination, l’invention de planètes imaginaires est une thématique qui laisse entrevoir l’idée que la création littéraire, en général, tient, pour une part importante, à la découverte, à l’exploration de territoires insolites. En effet, beaucoup de romanciers s’y adonnent. Leurs oeuvres intéressent toujours. Toutefois, celle de Pierre Bordage retient ici l’attention en raison de son style porté vers l’homme, la spiritualité et la tradition orale. Son cycle de space opéra intitulé Griots célestes est une véritable immersion dans des mondes aux caractéristiques variables. Désertiques, aquatiques, silencieuses, bruyantes, luxuriantes, pauvres,… ou mêlant plusieurs traits à la fois, les planètes nées de son imagination se situent sur une ligne temporelle absconse, indéfinie. Aussi, y trouve-t-on des occupants de tout acabit : des animaux mystérieux, des monstres reptiliens et des griots célestes interagissent autour d’une humanité en perdition. Avec la narratologie comme méthode, la présente analyse démontre que la science-fiction est féconde en matière d’invention de monde à l’instar de l’hyperespace bordagien. Somme toute, le diptyque définit, peu ou prou, un antagonisme opposant les sombres pulsions du dragon écarlate aux aspirations à la lumière des griots célestes. Cette métaphore du Bien et le Mal est une invite, non pas à devenir parfait, mais plutôt à s’accepter tel qu’on est ; en s’efforçant à mieux se connaître de sorte à comprendre les autres.
Mots-clés : planètes – imaginaires – science-fiction – espace – dysphorie
Abstract : Exciting for the imagination, the invention of imaginary planets is a theme which suggests the idea that literary creation, in general, is, to a significant extent, the discovery and exploration of unusual territories. Indeed, many novelists indulge in it. Their works are always of interest. However, that of Pierre Bordage attracts attention here because of its style focused on man, spirituality and oral tradition. His space opera cycle entitled Celestial Griots is a true immersion in worlds with varying characteristics. Desert, aquatic, silent, noisy, lush, poor,… or combining several features at once, the planets born from his imagination are located on an abstruse, indefinite time line. Also, we find occupants of all kinds: mysterious animals, reptilian monsters and celestial griots interact around a humanity in distress. With narratology as a method, the present analysis demonstrates that science fiction is fertile in terms of world invention, like Bordeaux’s hyperspace. All in all, the diptych defines, more or less, an antagonism opposing the dark impulses of the scarlet dragon to the aspirations for light of the celestial griots. This metaphor of Good and Evil is an invitation, not to become perfect, but rather to accept yourself as you are; striving to know oneself better so as to understand others.
Keywords: planets – imaginary – science fiction – space – dysphoria.
BENJAAFAR Ouafa
Résumé : La forêt de Fontainebleau est caractérisée par sa figure hétéromorphe, elle est conservatrice de mythes universels, elle est le lieu de quête et d’expérimentation, elle est à la fois le havre et la menace…Un cadre riche qui offre à la littérature du XIXe siècle une variété d’idées, de sujets et d’arrière-plan. Toutes ces caractéristiques que l’imaginaire et la mémoire attribuent inconsciemment à la forêt, permettent aux plumes des écrivains du siècle de refléter surtout deux types d’attitudes de leurs personnages envers la forêt de Fontainebleau : « la contemplation », et « l’initiation ». Dans le premier cas, la forêt devient le spectacle favori et la source de puissance et de vigueur, Quant au second cas, l’univers sylvestre est un espace d’épreuve et d’expériences.
Mots clés : la forêt de Fontainebleau, la description, XIXème siècle, Zola, Flaubert, Goncourt, Maupassant, Taine.
Abstract : The forest of Fontainebleau is characterized by its heteromorphic figure, it is the preserver of universal myths, it is the place of quest and experimentation, it is both the haven and the threat…A rich framework which offers 19th century literature century a variety of ideas, subjects and background. All these characteristics that the imagination and the memory unconsciously attribute to the forest, allow the pens of the writers of the century to reflect above all two types of attitudes of their characters towards the forest of Fontainebleau: « contemplation », and « initiation « . In the first case, the forest becomes the favorite spectacle and the source of power and vigor. As for the second case, the sylvan universe is a space of trial and experience.
Keywords : the forest of Fontainebleau, description, 19th century, Zola, Flaubert, Goncourt, Maupassant, Taine.
Dacharly MAPANGOU
Résumé: La plupart des villes du monde ont un signe distinctif immédiatement reconnaissable: pensons aux grands boulevards parisiens, aux gratte-ciel de New York ou aux églises de Rome. Mais Libreville , par ailleurs, est reconnaissable par ses matitis ou mapanes qui offrent une qualité de vie cruelle à ses populations. Cet article a pour but de révéler la cruauté de la ville postmoderne à travers L’Héritière du jaspe (2012) de Peggy Lucie Auleley et Les Chiens du roi. Le King des Mapanes (2018) d’Apis Ondo. Notre analyse, effecuée à l’aide de la géocritique de Bertrand Westphal fondée sur l’espace représenté dans la dynamique du texte, se concentre sur deux formes de cruauté urbaine : la cruauté socio-spatiale et la cruauté socio-axiologique.
Mots-clés : Cruauté socio-spatiale, cruauté socio-axiologique, géocritique, Libreville imaginaire, ville cruelle postmoderne
Abstract: Most cities in the world have an immediately recognizable distinctive sign: think of the great Parisian boulevards, the skyscrapers of New York or the churches of Rome. But Libreville is recognizable by its matitis or mapanes, which offer a cruel quality of life to its populations. This article aims to reveal the cruelty of the postmodern city through L’Héritière du jaspe (2012) by Peggy Lucie Auleley and Les Chiens du roi. Le King des Mapanes (2018) by Apis Ondo. Our analysis, carried out using Bertrand Westphal’s geocritism based on the space represented in the dynamics of the text, focuses on two forms of urban cruelty: socio-spatial cruelty and socio-axiological cruelty.
Keywords: Socio-spatial cruelty, socio-axiological cruelty, geocriticism, imaginary Libreville, postmodern cruel city
Jean-Jacques Koffi KASSI
Résumé : La présente analyse soulève, à partir de l’interprétation de l’imaginaire romanesque, la question de l’énonciation et des enjeux de la sorcellerie considérée en tant phénomène spirituel fondé sur la quatrième dimension. Cette transition de la littérature à l’herméneutique trouve sa justification dans la connexion entre l’organisation interne des récits et l’extraordinaire densité des mondes envahis par l’invisible, traversés de rats, de porc-épic, de baobab, de féticheurs, de génies, de revenants et qui basculent l’univers romanesque en dehors du vraisemblable, pour enfin faire la part belle aux pratiques chimériques. Cette fonction narrative, très rythmique, est signe de fusion, voire de communion entre le réel et le magique. Elle consiste à décrypter, sous forme d’enquête sociologique et ethnologique, comment Mémoires de porc-épic d’Alain Mabanckou et Silence, on développe de Jean-Marie Adiaffi construisent, avec des moyens stylistiques, rhétoriques ou narratifs, une part de l’identité culturelle et religieuse de l’Afrique.
Mots clés : énonciation et enjeux de la sorcellerie, quatrième dimension, pratiques chimériques, le réel et le magique, enquête sociologique, herméneutique.
Abstract: The present analysis raises, from the interpretation of the romantic imaginary, the question of the enunciation and the stakes of witchcraft considered as a spiritual phenomenon based on the fourth dimension. This transition from literature to hermeneutics finds its justification in the connection between the internal organization of the stories and the extraordinary density of the worlds invaded by the invisible, crossed by rats, porcupines, baobabs, witch doctors, geniuses, ghosts and who tilt the romantic universe outside of the plausible, to finally give pride of place to mystical practices. This narrative function, very rhythmic, is a sign of fusion or even communication between the real and the magical. It consists in deciphering, in the form of a sociological and ethnological investigation, how Mémoires de porc-épic by Alain Mabanckou and Silence on devellope by Jean-Marie Adiaffi constructs, with stylistic, rhetorical or narrative means, a part of the identity culture and religion of Africa.
Keywords: utterance and issues of witchcraft, fourth dimension, the real and the magical, fanciful practices, sociological investigation, hermeneutics.
Pauline CHAMPAGNAT
Résumé : Ces dernières années, nous avons assisté à l’éclosion de récits cherchant à relire le passé colonial et les relations Afrique/Europe. Un des procédés que nous avons pû constater serait l’utilisation de l’uchronie, comme dans le roman Blonde roots (2008), de l’auteure Anglo-nigériane Bernardine Evaristo, qui s’emploie à imaginer comment se serait déroulée la colonisation et le commerce triangulaire si les colonisés avaient été les Européens, et si les colons et trafiquants d’esclaves avaient été les Africains. On peut aussi évoquer l’utopie afro-futuriste de l’auteure Camerounaise Léonora Miano, avec son roman Rouge impératrice (2019), qui se projette dans une Afrique post-occidentale, post-coloniale et unifiée. Dans cette hypothétique « Katiopa » du futur, les anciens colons, à la recherche d’un passé mythique glorieux totalement révolu, peinent à s’insérer dans la société de l’Empire panafricain dans lequel ils évoluent. Dans une perspective comparatiste, nous chercherons à analyser ces deux romans, à la lumière d’œuvres théoriques telles que Afropea : utopie post-occidentale et post-raciste (Miano, 2020), et Sortir de la grande nuit : essai sur l’Afrique décolonisée (Mbembe, 2010). Dans un premier temps, nous accorderons une importance fondamentale à l’analyse des procédés de minorisation d’une culture, contribuant à créer un sentiment d’ « identité négative » (Mucchieli, 1986) par le peuple dont l’histoire et la culture auraient été dénigrées voire mises sous silence. Le roman Blonde roots souligne tout particulièrement les procédés de violence culturelle, symbolique et physique de minorisation employés dans n’importe quelle entreprise coloniale. Ensuite, nous nous intéresserons à la portée littéraire et politique de la présence de tels récits sur la scène littéraire contemporaine, ce qui ouvre la voie à un décentrement de la perspective traditionnelle, contribuant ainsi à la création de nouveaux imaginaires collectifs. Nous tenterons de comprendre comment le changement de perspective opéré par ces deux récits permet d’inverser des processus culturels et identitaires amplement intériorisés par un imaginaire collectif en voie de décolonisation.
Mots-clés : Blonde roots, Rouge impératrice, décolonisation, uchronie, utopie.
Abstract : In the past few years, we have seen a blooming of narratives that search to do a reinterpretation of the colonial past and the relationship between Africa and Europa. One of the mechanisms that we have observed is the use of the uchrony, just like in the novel from Anglo-Nigerian author Bernardine Evaristo Blonde roots (2008), that imagine how would have the colonization and the Slave Trade if the colonized had been Europeans and the slave traders had been the Africans. We can also evoke the Cameroonian author Léonora Miano, with her novel Rouge impératrice (2019), in which she projects in a post-occidental, post-colonial and unified Africa. In this hypothetical future « Katiopa », the former colons, in their search for a glorious and mythical past that had gone since a long time, are struggling to incorporate the society of the pan-African Empire in which they are living. In a comparatist perspective, we will try to analyze both of these novels, in light of theorical works such as: Afropea: utopie post-occidentale et post-raciste (Miano, 2020), and Sortir de la grande nuit : essai sur l’Afrique décolonisée (Mbembe, 2010). Firstly, we will emphasize the analysis of the mechanisms of the minorization of a whole culture, contributing to create a feeling of « negative identity » (Mucchieli, 1986) by the community which culture and history would have been belittled, or even silenced. The novel Blonde roots especially underline cultural, symbolical and physical methods of minorization used in every colonial venture. Secondly, we will focus on the literary and political scope of such narratives in contemporary literary scene, allowing, by the decentering of traditional perspective, the creation of new collective imaginaries. Consequently, we will try to understand how the switch of perspective operated by these two narratives able the inversion of cultural and identarian mechanisms fully interiorized by a collective imaginary, that is still in the process of a decolonization.
Keywords: Blonde roots, Rouge impératrice, decolonization, uchrony, utopia.
Mariame WANE LY
Résumé : Dès sa génèse, l’esclavage est confronté à la problématique du silence. La réappropriation de l’Histoire diasporique par la conservation des traces mémorielles et la construction de géographies imaginaires traversent ainsi avec constance la littérature africaine-américaine. De ce fait, l’espace littéraire, lieu imaginaire de la création littéraire, devient l’expression d’identités narratives noires. Cette expérience des lieux africaine américaine procède d’une conscience géographique dans ses rapports avec l’Afrique noire qui récuse de se déposséder dans une Amérique Blanche. Ainsi, l’imaginaire de l’Africain-Américain modelé par la déportation, fait état d’une représentation littéraire qui nécessite le traçage des géographies imaginaires produits dans les textes littéraires d’afro-descendants. En s’inspirant de Beloved (1987), A Mercy (2008) et Home (2012), la présente étude démontre que la difficulté, sinon l’impossibilité de dépasser le traumatisme initial, fait de la géographie imaginaire de Toni Morrison un rappel constant de l’esclavage. L’étude illustre également comment l’exil fondateur et l’imaginaire géographique s’unissent pour faire fonction d’alternative face à l’amnésie officielle devant une vérité historique indéniable. Notre hypothèse de travail consiste, dès lors, à comprendre comment la géographie imaginaire peut être un instrument de formulation d’une africanité clairement revendiquée. Il s’agira alors de démonter qu’en transformant la carte géographique de l’Amérique en une topographie de l’espace psychique, Toni Morrison décline une géographie mentale de la communauté africaine américaine.
Mots-clés : Afrique, altérité, diaspora, écriture, esclavage, géographie, histoire, identité.
Poetics of place and the transatlantic imaginary: A diasporic deciphering of slavery and the geography of identity in the fiction of Toni Morrison: Beloved (1987), A Mercy (2008) and Home (2012)
Abstract : From its very inception, slavery has been confronted with the problem of silence. The reappropriation of diasporic history through the preservation of memory traces and the construction of imaginary geographies is a constant theme in African-American literature. As a result, literary space, the imaginary locus of literary creation, becomes the expression of black narrative identities. This African-American experience of place stems from a geographical awareness of its relationship with Black Africa, which refuses to be dispossessed in a White America. In this way, the imaginary of the African-American shaped by deportation reveals a literary representation that requires the tracing of imaginary geographies produced in the literary texts of Afro-descendants. Drawing on Beloved (1987), A Mercy (2008) and Home (2012), this study demonstrates that the difficulty, if not impossibility, of moving beyond initial trauma makes Toni Morrison’s imaginary geographies a constant reminder of slavery. The study also illustrates how the founding exile and the geographical imagination come together to act as an alternative to the official amnesia in the face of an undeniable historical truth. Our working hypothesis is therefore to understand how imaginary geography can be an instrument for formulating a clearly asserted African identity. The aim is to show that, by transforming the geographical map of America into a topography of psychic space, Toni Morrison creates a mental geography of the African-American community.
Keywords : Africa, otherness, diaspora, writing, slavery, geography, history, identity.
Rachid ELHACHIMI
Résumé : Cet article se veut une étude de la représentation de l’espace désertique en tant qu’espace de la fiction et de l’utopie dans Désert (1980), l’œuvre de Jean-Marie Gustave Le Clézio. En lisant ce roman, il semble que le désert est un lieu de la fiction ; l’écrivain s’appuie sur sa propre imagination pour construire une image poétique qui dépasse les limites de la réalité géographique. En effet, cet espace constitue pour Lalla et Nour, les personnages principaux du roman sus cité, un lieu d’inspiration, un espace d’éternité, un monde divin et de merveilles. Au cœur de ce lieu purement naturel, l’espace intime du personnage s’harmonise poétiquement avec les éléments de la Nature, ce qui permet au protagoniste d’accéder au monde mythique. De plus, l’espace désertique concrétise le sens de l’Utopie puisqu’il représente le pays de bonheur. En voyant cet espace naturel caressé par la mer et la lumière, le personnage peut accéder à des lieux inexistants dans la réalité. Il y éprouve le sentiment de la plénitude complète et de la paix intérieure. En ce sens, le désert est une ville de l’impossible où l’individu trouve la justice totale et l’égalité absolue.
Mots-clés : représentation – l’espace désertique – fiction – Utopie – Le Clézio
Abstract : This article aims to be a study of the representation of the desert space as a space of fiction and utopia in Desert (1980), the work of Jean-Marie Gustave Le Clézio. Reading this novel, it seems that the desert is a place of fiction; the writer relies on his own imagination to build a poetic image that goes beyond the limits of geographical reality. Indeed, this space constitutes for Lalla and Nour, the main characters of the aforementioned novel, a place of inspiration, a space of eternity, a divine world and wonders. At the heart of this purely natural place, the intimate space of the character poetically harmonizes with the elements of Nature, which allows the protagonist to access the mythical world. In addition, the desert space embodies the meaning of Utopia since it represents the country of happiness. By seeing this natural space caressed by the sea and the light, the character can access places that do not exist in reality. There he experiences the feeling of complete plenitude and inner peace. In this sense, the desert is a city of the impossible where the individual finds total justice and absolute equality.
Keywords : representation – desert space – fiction – Utopia – Le Clézio
Marius BAVEKOUMBOU
Résumé : Depuis quelques années, dans l’enceinte des théories sémiotiques, à tendance textuelle et interprétative, le rapport entre signifiant et signifié est reconstruit ; privilégiant ainsi le signe comme un passage. Rastier situe le signe comme moment d’un parcours interprétatif élémentaire allant d’un signifié à un autre. La sphère sémiotique désigne le signe comme un passage entre signes. Ce qui suppose une nouvelle approche de la notion de texte comme un système de traits polysémiotiques. De ce point de vue, nous ne pouvons qu’obtenir des codes interprétatifs différentiés pour aborder les textes. La fonction du signe consiste avant toute irruption de l’imaginaire à organiser les formes sémantiques, des parcours interprétatifs et des régimes de sens. Il s’agit donc d’ouvrir un champ des possibles littéraires constituées de relations actantielles articulées dans un espace-temps sémiotique.
Mots-clés : signe – sémiotique – espace – imaginaire – sémantiques
Abstract : For several years, within the confines of semiotic theories, with a textual and interpretative tendency, the relationship between signifier and signified has been reconstructed; thus favoring the sign as a passage. Rastier situates the sign as a moment in an elementary interpretive journey going from one signified to another. The semiotic sphere designates the sign as a passage between signs. Which supposes a new approach to the notion of text as a system of polysemiotic features. From this point of view, we can only obtain differentiated interpretative codes to approach the texts. The function of the sign consists, before any irruption of the imagination, in organizing semantic forms, interpretative pathways and regimes of meaning. It is therefore a question of opening up a field of literary possibilities made up of actantial relations articulated in a semiotic space-time.
Keywords : sign – semiotic-space -imaginary – semantic
Koffi François KONAN
Résumé : Monénembo procède au renversement des valeurs sociales. Il décrit sans retenue tout ce qui n’est pas beau à voir. Son écriture baigne dans le sang et coule dans le roman de Monénembo. Les images de violence et de crimes crapuleux atteignent le paroxysme de l’inadmissible Son écriture a la particularité de célébrer la violence dans un univers excrémentiel dans lequel évoluent des personnages monstrueux. Il est question dans les œuvres romanesques de Tierno Monénembo, d’une écriture qui dérive vers l’inénarrable. Monénembo, dans sa quête d’originalité, brise les barrières des convenances, des normes et des tabous par une écriture carnavalesque autour de pratiques sociales transgressives.
Mots-clés : Ecriture de la violence, monstre, laid, tératologie, dérive.
Blood and excrement, the horrible and the sordid or the disorder of reason in the novel by Tierno Monénembo.
Abstract : Monénembo proceeds to overturn social values. He describes without restraint everything that is not beautiful to see. His writing is bathed in blood and flows into Monénembo’s novel. The images of violence and heinous crimes reach the paroxysm of the unacceptable. His writing has the particularity of celebrating violence in an excremental universe in which monstrous characters evolve. In the novelistic works of Tierno Monénembo, it is a question of writing that drifts towards the unnarrable. Monénembo, in his quest for originality, breaks the barriers of conventions, norms and taboos through carnivalesque writing around transgressive social practices.
Keywords: Writing of violence, monster, ugly, teratology, drift